OLEANDER ET THEVETIA

Le laurier rose, NERIUM OLEANDER,APOCYNACEAE, est un arbuste originaire du pourtour méditerranéen, au feuillage persistant, aux fleurs roses mais parfois blanches ou rouges.

C’est un arbuste très résistant à la sécheresse mais qui s’accommodent également des climats tropicaux humides, il est sensible au froid et craint le gel, il passe l’hiver en serre dans les pays tempérés à hiver froid.

Le laurier rose est très répandu dans les pays chauds aussi bien dans les jardins que le long des routes et des autoroutes.
Il est très apprécié pour son feuillage persistant même en zone aride et ses nombreuses fleurs décoratives.
il se naturalise facilement et apprécie les zones rocheuses près des cours d’eau temporaires et des fonds de vallées.

Le laurier jaune, THEVETIA NERIIFOLIA = THEVETIA PERUVIANA, APOCYNACEAE , vient d’Amérique tropicale mais a été répandu dans la plupart des régions chaudes, c’est un arbre au feuillage élégant, aux feuilles longues et étroites, et aux fleurs jaune citron.

On le plante dans beaucoup de jardins et aussi dans les lieux publics y compris les écoles( ce qui est surprenant à cause de sa toxicité).

Il s’acclimate facilement en zone tropicale et on le rencontre, naturalisé, dans les zones en friches , près des décharges sauvages, près des canaux d’irrigation.

LAURIER ROSE NERIUM OLEANDER, LAURIER JAUNE THEVETIA NERIIFOLIA, THEVETIA PERUVIANA , TOXIQUE, DÉCORATIF , CARDIOTONIQUE, CANCER

Ces deux arbres décoratifs font partie d’une famille botanique (apocynacée) dont les espèces sont souvent toxiques mais qui fournissent à la médecine de nombreuses molécules pharmacologiquement très actives et intéressantes pour leur structure chimique qui sert de base à la synthèse de nouveaux médicaments.

Toutes les parties de ces deux arbres, laurier rose, Nerium oleander, et thevetia, Thevetia peruviana = Thevetia neriifolia, contiennent des substances intéressantes en pharmacologie et en phytothérapie, principalement des hétérosides cardiotoniques.

COMPOSITION CHIMIQUE ET PROPRIETES

NERIUM OLEANDER LAURIER ROSE : FEUILLES, LATEX, BOIS

Le composé le plus caractéristique du laurier rose est l’oléandrine, un hétéroside à structure stéroïdique, qui ressemble beaucoup du plus de vue chimique et pharmacologique à l’ouabaïne et à la digoxine, deux cardiotoniques très utilisés en cas d’insuffisance cardiaque.

L’action de l’oléandrine est double :

  • interaction avec la pompe à Na+ et K+ des cellules du muscle cardiaque
  • et action direct sur le tonus vagal donc la régulation nerveuse des battements cardiaques.

La pompe sodium-potassium ou Na+-K+ ATPase est un système enzymatique qui controle les échanges entre le sodium et le potassium intra et extracellulaire, ce qui règle l’activité de la cellule et sa mise au repos .
Dans le cas du myocarde (muscle du coeur) , cela décide de l’importance de la contraction du coeur et de son rythme de contraction.

L’oléandrine et ses dérivés bloquent l’action de ce système enzymatique, et font ainsi se prolonger la contraction du coeur.

La deuxième action importante de l’oléandrine est sur la régulation du nerf vague ou pneumogastrique (10 ième paire cranienne) qui innerve entre autre le coeur et les organes digestifs.
L’augmentation du « tonus » du nerf vagal provoque un ralentissement du rythme cardiaque et des troubles digestifs (nausées, vomissements).

L’oléandrine et ces dérivés sont présents dans toutes les parties du laurier rose (feuilles, fleurs, sève-latex, bois, racines), leur quantité est variable dans le temps et en fonction des conditions de culture.
L’oléandrine est soluble dans l’eau (pot de fleurs, pots à bouture) et est présente dans la fumée quand on brûle du laurier rose même sec.

Il semblerait que les conditions arides augmentent la concentration en glucosides cardiotoniques dans le laurier rose (jusqu’à 2%).

THEVETIA PERUVIANA, T. NERIIFOLIA, LAURIER JAUNE:LATEX, GRAINES

Toutes les parties du laurier jaune ou thevetia contiennent un latex toxique, incolore ou blanc virant au noir à l’air, mais ce sont les GRAINES qui sont considérées comme les plus toxiques.

Les fruits sont globuleux et verts (3 à 5 cm de diamètre) puis deviennent noiratres en séchant .

Les substances actives sont des glucosides cardiotoniques dont la structure est semblable à celle de l’oléandrine : les principales sont les thévetines A et B et le péruvioside .

L’action des thévetines sur le système enzymatique pompe sodium-potassium ou Na+-K+ ATPase est comparable celle des autres glucosides (ouabaïne, digoxine, oléandrine).

Ce sont également des substances solubles dans l’eau, résistant à la dessication et présentes dans la fumée de bois de laurier jaune, thevetia, frais ou sec.

UTILISATIONS

INTOXICATION PAR LE LAURIER ROSE ET LE LAURIER JAUNE

Tous les mammifères et la plupart des vertébrés sont sensibles à l’action des glucosides cardiotoniques du type oléandrine ou thévétine.

L’intoxication est accidentelle ou délibérée. Le laurier rose et surtout le laurier jaune sont en-effet assez souvent utilisés à des fins suicidaires.

Chez l’homme l’intoxication par voie orale est rapide et s’accompagne d’abord de troubles digestifs : nausées ,vomissements, diarrhée. Ces troubles permettent d’éliminer en partie les produits toxiques qui n’ont pas eu le temps d’être absorbé au niveau digestif.

L’action sur le coeur est rapide : ralentissement du rythme cardiaque (bradychardie) avec troubles du rythme (arythmie, fibrillation) parfois jusqu’à l’arrêt cardiaque (asystolie).

On peut observer une rougeur autour de la bouche en cas d’intoxication par le laurier rose.

La quantité mortelle de feuilles ou de graines est très variable et dépend beaucoup de la précocité des vomissements.
Les annales de toxicologie donnent des informations parfois contradictoires : mortalité infantile avec juste une feuille de laurier rose ou absence de troubles majeurs après l’ingestion de plusieurs feuilles.
Les adultes sont bien sur plus résistants .

En l’absence de troubles cardiaques graves la « guérison » demande 3 à 4 jours le temps d’éliminer le glucoside cardiotonique.

On peut rechercher la présence de glucosides cardiotoniques dans le sang en utilisant le test immunologique de la digoxine , cela permet aussi de quantifier l’importance de l’intoxication et donc le risque vital.

Le traitement symptomatique est controversé (atropine, lidocaïne, magnésium intraveineux).

L’utilisation d’anticorps spécifiques de la digoxine( anticorps monoclonaux) pour neutraliser les glucosides aussi bien du laurier rose que du thevetia sont le meilleur traitement actuellement préconisé en cas d’intoxication importante , bien que difficile à trouver dans les pays en développement.

Les herbivores peuvent s’empoisonner avec les feuilles de laurier rose.

Les feuilles sèches sont généralement en cause car la feuille fraiche de laurier rose est plutot repoussante sauf si l’animal est affamé .

  • 30 à 60 g de feuilles fraîches seraient potentiellement mortelles pour les bovins adultes et 4 à 8 g de feuilles seraient potentiellement mortelles pour les petits ruminants (surtout les moutons).
  • L’eau dans laquelle a macéré des feuilles ou des branches de laurier rose est également toxique pour les bêtes.

On trouve dans la littérature scientifique des intoxications humaines à l’oléandrine (laurier rose) par des escargots ainsi que par du miel dans les zones où les laurier roses sont très abondants et où les abeilles n’ont pas d’autres ressources florales. (c’est étonnant car les fleurs de laurier rose n’ont pas de nectar, l’intoxication est peut-être due au pollen ou à des exsudats toxiques).

Dans certains pays d’Amérique du sud le latex de thevetia ou les graines de thevetia (laurier jaune) sont employées pour éliminer les rats et les chiens errants.

Le latex des deux lauriers est irritant pour la muqueuse buccale et les yeux. C’est l’intoxication minimum des enfants qui « gouttent » aux feuilles et qui jouent dans les buissons de laurier rose.

Certains tradipraticiens d’Afrique du nord préconisent des bains de pieds d’une infusion diluée de feuilles de laurier rose qui peut provoquer des brûlures chimiques assez graves pouvant conduire à l’amputation d’orteils.

LAURIER ROSE ET LAURIER JAUNE EN PHYTOTHERAPIE

Le glucosides cardiotoniques ou digitaliques sont moins utilisés que par le passé.

On limite leur utilisation aux insuffisances cardiaques surtout quand il y a une fibrillation auriculaire (la contraction des oreillettes du coeur est très perturbée) avec augmentation du rythme cardiaque (tachycardie).

Le problème de ces substances est la faible différence entre la dose efficace et la dose toxique.

En médecine occidentale on utilise essentiellement les extraits de digitale (digoxine) en traitement prolongé et de strophantus (ouabaïne) en traitement d’urgence.

Les extraits de laurier rose et de laurier jaune ont été utilisés de la même facon mais sont tombés en désuétude en France. Néanmoins, il existait récemment encore des extraits de thevetia (laurier jaune) dosés en thévetine dans certains pays européens (Italie, Allemagne, Hollande).

La dose usuelle par voie orale est chez l’adulte:
Cinq cents microgrammes à deux milligrammes par jour en plusieurs prises de thévétine A et B

LAURIER ROSE ET LAURIER JAUNE THEVETIA CONTRE LE CANCER

Nous avons vu plus haut que les glucosides de ces deux plantes modifient le fonctionnement de la pompe à Na+ K+.
Certaines cellules cancéreuses ont absolument besoin du bon fonctionnement de ce système enzymatique pour se reproduire et tout simplement survivre car leur métabolisme est plus accéléré que celui des cellules saines.
On peut donc tenter de bloquer le développement de certains cancers par ces substances relativement peu toxiques aux doses efficaces.

Récemment (2009) un premier essai (phase I) chez l’homme a été lancé avec de l’oléandrine (laurier rose) chez des malades atteints de tumeurs avancées ( vessie, colon, utérus) et les résultats semblaient prometteurs mais à ma connaissance les essais suivants ( 2 et 3) ont été abandonnés à causes d’effets secondaires importants.

RESUME

LAURIER ROSE ET LAURIER JAUNE, DES ARBRES DECORATIFS MAIS TOXIQUES POUVANT SOIGNER LE COEUR

Le laurier-rose est méditerranéen, le laurier jaune ou thevetia , sud américain ; tous deux sont souvent plantés commme arbres de jardins ou pour faire des haies fleuries dans les régions chaudes.
Leurs feuilles ou leurs graines contiennent des substances toxiques mais qui à très faible dose peuvent être utilisées pour régulariser le coeur et renforcer ses contractions.
On étudie actuellement leurs extraits pour lutter contre certains cancer.

Copyright 2023 : Dr Jean-Michel Hurtel

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