L’ABSINTHE, ARTEMISIA ABSINTHIUM, ASTERACEAE, est une plante originaire de l’Europe, de l’Asie tempérée et de l’Afrique du nord mais qui s’est acclimatée en Amérique du Nord et dans d’autres pays au climat semblable.
Elle fait partie du groupe des armoises.
On l’utilise comme plante médicinale depuis l’antiquité.
Elle est vivace (mais herbacée) et présente une tige dressée et ramifiée pouvant atteindre entre 1 m et 1,5 m, ses feuilles sont abondantes et particulières : alternes, bipennées, vertes sur le dessus et blanchâtres sur le dessous avec un aspect poudreux, elles sont aromatiques et amères.
Les fleurs sont petites, tubulaires, groupées en capitules pendants de couleur jaune pale.
Les graines sont petites et se dispersent facilement.
L’absinthe est une plante de plein soleil, à la fois sauvage et cultivée, qui supporte bien la sécheresse grâce à sa racine profonde.
On la connait surtout comme la base d’une boisson alcoolisée ayant provoqué de nombreuses intoxications par adultérations grossières et qui a donc été interdite à la consommation pendant longtemps.
Mais les choses ont évolué et on peut consommer à nouveau (avec modération) des boissons apéritives à base d’absinthe.
C’est aussi une plante médicinale par son huile essentielle et les composés amers qu’elle contient.
L’ABSINTHE PLANTE MEDICINALE AMERE
Les feuilles d’absinthe renferment un pourcentage variable en huile essentielle (entre 0,5 et 2%), selon le climat, les conditions de culture et la période de l’année.
L’huile essentielle d’absinthe n’est pas amère mais agréablement aromatique.
On y trouve du 1-8 cinéole (eucalyptol), du camphre, du linalol et de la thuyone (les deux isomères alpha et beta).
La thuyone est NEUROTOXIQUE, elle peut provoquer des crises d’épilepsie et des troubles neurologiques irréversibles quand on en absorbe de façon régulière des quantités importantes.
La grande amertume des feuilles d’absinthe est due à la présence de lactones sesquiterpéniques solubles dans l’eau et l’alcool (donc dans une infusion , tisane ou macération alcoolique) exemples : absinthine, guaianolide (également dans la racine de pissenlit), artémisine(présente également dans Artemisia annua, armoise de Chine, plante antipaludéenne).
LA LIQUEUR d’ABSINTHE : la fée verte
La liqueur d’absinthe est le produit de la distillation d’une macération alcoolique de feuilles d’absinthe suivie d’une coloration et d’une aromatisation secondaire par d’autres plantes, exemple : anis vert, hysope, fenouil, mélisse, menthe.
La coloration verte de la liqueur est due à la diffusion de la chlorophylle de ces plantes fraiches ou sèches.
Il n’y a pas qu’un type de liqueur d’absinthe, c’est une boisson traditionnelle dont les recettes sont nombreuses en Suisse et en France mais aussi dans beaucoup d’autres pays européens.
Voila un EXEMPLE DE LIQUEUR D’ABSINTHE (simplifé) traditionnel du Jura en France :
Feuilles d’ absinthe sèches fractionnées 2.5 Kg, Anis vert 5 Kg, Fenouil de Florence 5 Kg, Alcool à 85°, 95 litres.
- 1 macération de cette préparation pendant au moins 12 h,
- 2 distillation de cette macération que l’on aura préalablement diluée avec 45 litres d’eau tiède,
- 3 coloration : on ajoute au distillat (incolore) des plantes aromatiques finement coupées : Feuilles de petite absinthe(ou absinthe romaine, Artemisia pontica) sèche et fractionnées 1 kg , Hysope (Hyssopus officinalis) sommités sèches et fleuries (qui contiennent également de la thuyone) 1 kg, Mélisse citronnée (Melissa officinalis) sèche et fractionnée 0,5 kg.
- 4 on laisse macérer l’ensemble à 40-50° C puis quand la couleur a bien diffusé, on laisse refroidir, filtre et ajuste le degré alcoolique aux alentours de 70°.
La liqueur se conserve en flacon de verre ou en fut pendant quelques mois pendant lesquels elle bonifie.
Cette liqueur d’absinthe possède donc une dégré alcoolique très élevé, sa teneur en thuyone ne doit pas dépasser 35 mg par litre.
La liqueur d’absinthe est connue historiquement pour sa toxicité qui en a fait interdire la fabrication et la vente dans de nombreux pays dont la France (en 1914).
On pense maintenant que la toxicité redoutable de cette liqueur n’était pas due à sa teneur en thuyone mais à sa fabrication et son adultération : utilisation des « têtes de distillat » au fort pourcentage en alcool méthylique (alcool de bois) neurotoxique, coloration artificielle avec des sels de cuivre (toxiques), adultération par des huiles essentielles neurotoxiques.
La majorité des pays ont levé l’interdiction de fabrication et de vente de la liqueur d’absinthe (2011 pour la France), en maintenant souvent une règlementation sur la teneur en thuyone.
UTILISATIONS d’ARTEMISIA ABSINTHIUM, L’ABSINTHE
Traditionnellement l’absinthe s’utilise en INFUSION AQUEUSE (thé ou tisane) :
- Pour favoriser la digestion,
- comme « tonique »,
- pour éliminer les parasites intestinaux,
- pour lutter contre des infections virales .
C’est très amer, mais atoxique car il y a très peu de thuyone dans cette infusion.
L’indication principale de l’absinthe c’est l’amélioration de l’appétit (plante apéritive), plus secondairement pour faciliter la digestion et comme plante « tonifiante ».
On peut également en faire une MACERATION ALCOOLIQUE(alcoolat ou teinture mère) que l’on trouve également dans certaines herboristeries : cette préparation contient de la thuyone et est donc contre-indiquée chez le jeune enfant, la femme enceinte et allaitant.
On l’utilise avec parcimonie (amertume) dans un peu d’eau pour les mêmes indications (digestion, tonique, parasites, fièvres).
Aux Antilles Françaises la macération d’absinthe ou d’armoise dans du rhum agricole est appréciée surtout comme « décollage » (pour bien démarrer la journée) à consommer avec beaucoup de modération à cause de la présence de thuyone neurotoxique.
Récemment certaines études ont montré que de l’absinthe en poudre (500 mg 3 fois par jour en gélules) pouvaient apaiser les troubles coliques inflammatoires (intestin irritable et maladie de Crohn).
L’absinthe permet également d’atténuer les effets du diabète de type 2 (étude chinoise).
L’huile essentielle d’absinthe est modérément antiseptique, on ne l’utilise pas par voie buccale à cause de sa teneur en thuyone. Elle serait active sur certains protozoaires pathogènes, mais sans applications médicales à ma connaissance.
CULTURE de L’ABSINTHE
L’absinthe, Artemisia absinthium, est facile à cultiver. Elle se propage par semis, par bouture, par fragmentation des racines. On trouve en jardinerie ou chez des grainetiers des graines ou des plants d’absinthe.
Attention à ne pas les planter trop près d’autres plantes plus fragiles, l’absinthe peut empêcher le développement ou éliminer certaines plantes.
On peut s’en servir (semble-t-il) pour éloigner certains insectes parasites des légumes ou en faire un « purin » qui décourage les limaces et les escargots.
L’absinthe n’aime pas les sols humides et préfère le plein soleil. On récolte les feuilles bien developpées, on les fait sécher à l’ombre.
QUELQUES PLANTES VOISINES
D’autres « armoises » d’aspect voisin sont également médicinales ou utiles.
Artemisia annua , ou armoise de chine, utilisée depuis longtemps dans la médecine traditionnelle chinoise et à l’origine de médicaments anti-paludéens (des dérivés de l’artémisinine) très importants car actifs sur les formes résistantes à la nivaquine de Plasmodium falciparum .
Artemisia vulgaris, armoise commune ou armoise citronnée, très commune et considérée comme envahissante. Son pollen provoque des allergies respiratoires, mais c’est néanmoins une plante médicinale traditionnelle ( apéritive, anti-spasmodique, anti-helminthique, et interagissant de façon négative sur la fertilité féminine)
Artemisia abrotanum ou aurone, moins utilisée mais également apéritive, sudorifique, régulant les règles et éloignant les insectes (sachet de feuilles sèches d’aurone).
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